To Benjamin Franklin from Horace-Benedict de Saussure, 23 February 1773
From Horace-Bénédict de Saussure4
ALS: American Philosophical Society
Naples le 23e. Févr. 1773.
Monsieur
J’ai reçu avec un extrême plaisir les deux lettres que vous m’avés fait l’honneur de m’écrire, l’une du 8e. Octobre, l’autre du 1er. Xbre de l’année dernière. Mais comme elles m’étoient l’une et l’autre adressées à Genève, et que j’en suis parti dès le commencement d’Octobre pour venir passer l’hyver en Italie, elles me sont parvenues extrêmement tard, et j’ai été ainsi privé de l’avantage de vous témoigner par une prompte réponse combien je suis flatté de l’honneur de votre correspondance.
La Lettre sur l’action des conducteurs pointus et le Mémoire qui l’accompagne, m’ont paru remplis d’expériences et de raisonnements absolument démonstratifs, et qui ne laissent aucun doute sur l’utilité de ces ingénieux Préservatifs. Si j’avois eu connaissance de ces Expériences nouvelles je m’en serois prévalu avec bien de l’avantage dans un petit Mémoire apologétique que je publiai au mois d’Octobre 1771. pour éclairer quelques personnes qui étoient effrayées d’un Conducteur que j’avois fait dresser à Genève devant la maison que j’habite.5 Ce Mémoire eut cependant le succès que je desirois, il rassura tout le monde, et j’ai eu le plaisir d’observer l’Electricité des Nuages pendant tout le cours de l’Eté dernier. Plusieurs personnes ont même suivi cet Exemple et ont fait dresser des conducteurs ou sur leur maison même ou devant leur maison. M. de Voltaire a été un des premiers. Il a rendu à votre Théorie, Monsieur, la même justice qu’il rendit à celle de l’immortel Newton.6
Le projet de la Société Royale est bien digne du zêle de cet Illustre Corps pour l’avancement des connoissances utiles, et je serois bien flatté si je pouvois la séconder en quelque chose dans l’exécution de ce projet. Si j’avois été à Genève, je me serois fait un devoir et un plaisir d’aller faire un Voyage dans les Montagnes des environs pour déterminer avec exactitude les dimensions des Montagnes et des Vallées que je penserois les plus convenables pour l’exécution de ce projet. Je ne crois cependant pas qu’il y ait dans aucune de celles qui me sont connues aucun endroit vraiment propre à donner des lumières certaines sur l’objet qui fait le but de ces Recherches. Déja dans le Jurat il n’y a point de hauteur assez considérable puisque la Dole qui est la montagne la plus élevée au dessus du Niveau de notre Lac n’arrive pas à 700 Toises au dessus de ce même niveau. Ensuite il faut considérer que le Jurat de même que les Alpes forment des chaines continues de Montagnes toutes liées les unes aux autres et situées du moins à de petites distances les unes des autres. Il n’y a, ou du moins je ne connois aucune montagne isolée d’une hauteur suffisante. On trouve fréquemment de profondes vallées bordées de hautes montagnes, mais ces montagnes ont derrière elles d’autres vallées et d’autres montagnes, en sorte que les déviations que l’on observeroit dans le fil à plomb seroient l’effet complexe des attractions réunies de toutes ces montagnes; et pour en déduire une comparaison entre la densité de la terre et celle de ces Montagnes il faudroit bien des travaux et bien des calculs. Autant que je puis en juger, il me paroit que quelque grand Rocher élevé en pleine mer, comme le Pic de Ténériffe seroit le lieu le plus convenable pour cette recherche.7 J’ai fait passer à Genève à Mylord Stanhope le Mémoire que vous m’avés fait l’honneur de m’envoyer sur ce sujet afin qu’il puisse en conférer avec M. de Luc qui s’étant principalement occupé de la hauteur des Montagnes à l’occasion de ses recherches sur le Baromètre, est l’homme du monde le plus propre à donner de bonnes lumieres sur ce sujet. On n’ignore sans doute pas non plus que le Père Beccaria de Turin qui a mesuré un degré du Méridien au pied des Alpes, a eu occasion d’observer de grandes déviations du fil à plomb, et pourroit ainsi donner à la Société Royale des directions utiles.8
J’ai le bonheur de voir souvent ici M. le Chevalier Hamilton qui a la bonté de me conduire dans les endroits les plus intéressans des environs de Naples, ceux qui établissent la Théorie sur les Volcans ancients et modernes, et qui prouvent que tout le Golphe de Naples depuis la Mer jusque aux Apennins a été lancé du fonds de la mer par les feux souterrains et est ainsi le produit des Volcans plustot que le théatre de leurs ravages. Nous nous occupons aussi beaucoup d’Electricité, la petite machine que lui a faite M. Nairne est réellement excellente, et de beaucoup la meilleure qu’il y eut jamais eue dans cette partie de l’Italie. M. Hamilton sçachant que j’avois l’honneur de vous écrire, m’a chargé de vous faire ses compliments.9
Je suis bien faché de ne m’etre pas trouvé à Genève pour y recevoir M. de Normandy,10 j’aurois été charmé d’avoir cette occasion de vous prouver le cas que je fais de votre recommandation. Si vous aviés quelques ordres à me donner à Naples, je pourrois encore les y recevoir, et vous pourriés les adresser à M. Hamilton. Nous nous proposons de faire ensemble quelques Expériences sur l’électricité des Vapeurs du Vésuve, quoiqu’à dire le vrai, je ne les considère que comme des conducteurs qui établissent une communication entre la Terre et les régions supérieures de l’Atmosphère.
M. Hamilton m’a fait aussi la grace de m’inviter à voir quelques expériences qu’il a faites sur la Torpedo, ces Expériences ne sont pas décisives parceque les poissons que nous avons eus étoient petits et ne donnoient que de foibles secousses, mais il n’a paru aucun signe quelconque d’électricité. Nous attendons d’en avoir de plus grosses pour continuer ces recherches suivant le plan que vous avés tracé vous même.11
Agréés les assurances des sentimens distingués de considération et d’estime avec lesquels j’ai l’honneur d’être, Monsieur, Votre très humble et tres obeissant serviteur
De Saussure
4. For the Genevan physicist and scientist see above, XIX, 324 n.
5. For BF’s letter, the enclosed memoir of his experiments, and de Saussure’s pamphlet see idem., pp. 324–7.
6. Voltaire’s homage to the electrical theory was, we assume, the lightning rod itself; but he also mentioned BF and discussed rods at some length in his article on thunder in Questions sur l’Encyclopédie … (9 vols., [Geneva,] 1771–72), IX, 24, 27–9. As for Newton, Voltaire had championed his theories in Elémens de la philosophie de Neuton … (Amsterdam, 1738), Reponse a toutes les objections principales qu’on a faites en France contre la philosophie de Neuton (Amsterdam, 1739), and La Métaphysique de Neuton … (Amsterdam, 1740). On his Italian trip, incidentally, de Saussure had a letter of introduction from Voltaire: Theodore Besterman, ed., Voltaire’s Correspondence … (107 vols., Geneva, 1953–65), LXXXIII, 50.
7. Scientists had long been interested in improving Newton’s calculations of the earth’s density by estimating the mass of a mountain and then determining how much it deflected a plumb line. In 1772 Nevil Maskelyne urged the Royal Society to initiate experiments. On July 23, 1772, the Council appointed a committee consisting of BF, Maskelyne, Henry Cavendish, and others to investigate the matter; on Sept. 9, 1773, the committee was reappointed with the addition of William Watson. The members seem to have done little more, however, than arrange for the surveying of feasible sites and, when one was chosen, for Maskelyne to take charge of the investigation. MS Council minutes, the Royal Society, especially pp. 145, 205, 234–5, 242. BF, in his missing letter of Dec. 1, 1772, probably asked de Saussure about the feasibility of measurements in the Alps; but the committee seems to have had no such idea. A hill in Perthshire was eventually chosen, and in 1774–76 Maskelyne directed elaborate observations there. See the Rev. Nevil Maskelyne, “A Proposal for Measuring the Attraction of Some Hill in This Kingdom by Astronomical Observations” (1772), and “An Account of Observations Made on the Mountain Schehallien for Finding Its Attraction” (1775), printed together in Phil. Trans., LXV (1775), 495–542; Sir John Pringle, A Discourse upon the Attraction of Mountains … (London, 1775); Charles Hutton, “An Account of the Calculations Made from the Survey and Measures Taken at Schehallien …,” Phil. Trans., LXVIII (1778), part 2, 689–788; Charles H. Weld, History of the Royal Society … (2 vols., London, 1848), II, 77–83; A. Stanley Mackenzie, ed., The Laws of Gravitation: Memoirs by Newton, Bouguer and Cavendish … (New York, etc., [1900]), pp. 53–6.
8. For Lord Stanhope see BF to Galloway above, Feb. 14. Jean-André Deluc (1727–1817) was a Swiss meteorologist who had just published his Recherches sur les modifications de l’atmosphère … (2 vols., Geneva, 1772); he was well known for his portable barometer, with which he measured the altitude of mountains. DNB; Larousse, Dictionnaire universel. Giambatista Beccaria needs no introduction as an electrical experimenter, but he is less well known as a geographer. In 1759 he had been commissioned by the King of Sardinia to measure a degree of longitude in Piedmont, and in doing so had observed the deflection of the plumb line caused by the attraction of the Alps. Ibid.
9. Sir William Hamilton (1730–1803), K.B., F.R.S., had been the British envoy to the court of Naples since 1764. He was outstanding as a collector of ancient art, and was also a volcanologist and seismologist; his later claim to fame was as the husband of Lord Nelson’s mistress. DNB; Brian Fothergill, Sir William Hamilton, Envoy Extraordinary (London, [1969]). Edward Nairne, the instrument-maker, was noted for his electrical machines; see BF to Ingenhousz below, Sept. 30.
10. For Dr. John Denormandie, a friend of Galloway who had gone to Geneva by way of London, see above, XIX, 332 n.
11. John Walsh’s experiments the previous summer with the torpedo fish had demonstrated that its shocks were in fact electrical, but his findings were not widely known until the publication of his letter to BF below, July 1. BF’s plan for experimental testing was presumably that printed above, XIX, 234–5; nothing else we know of fits the description. But in that case how did de Saussure know of the plan? BF, thinking him in Geneva, could scarcely have anticipated his interest in investigating the torpedo; hence we suspect that the Swiss learned about the fish from his companion. Hamilton had been on leave in England, and had begun his return in the fall of 1772. Fothergill, op. cit., p. 121. At that time Walsh’s discoveries were presumably the talk of the Royal Society; any one as curious about electricity as Sir William would have been likely to hear about the torpedo and BF’s suggestions for testing it.